Core Ultra : Intel fait sa révolution avec Meteor Lake
Intel vient de dévoiler ses puces Meteor Lake, et c'est une petite révolution. Avec une efficacité énergétique inédite sur PC, une section graphique remise à niveau et des modules dédiés à IA, les processeurs Core Ultra se posent en concurrents redoutables face à Apple et AMD.
Les processeurs Intel Core avaient quelque peu perdu de leur superbe ces dernières années, notamment face aux puces M d'Apple et leur impressionnante efficacité énergétique, et aux Ryzen d'AMD dotés de leurs redoutables circuits graphiques intégrés. La situation pourrait cependant changer du tout au tout avec l'arrivée des Core Ultra, la toute nouvelle génération de processeurs d'Intel reposant sur l'architecture Meteor Lake.
Annoncée en septembre dernier et dévoilée officiellement le 14 décembre 2023, au cours d'une conférence au ton pour le moins étrange, la gamme de processeurs Core Ultra, destinée aux ordinateurs portables, marque une évolution radicale dans la conception des puces d'Intel et apporte des avancées significatives dans trois domaines : l'efficacité énergétique, la puissance graphique et l'intelligence artificielle.
Bonne nouvelle, il ne s'agit pas de simples annonces pour l'avenir, mais bien d'une réalité d'ores et déjà palpable, car plusieurs modèles de PC portables équipés de ces nouvelles puces sont dès à présent disponibles, et les premiers tests réalisés semblent confirmer qu'Intel a tenu toutes ses promesses.
Intel Core Ultra : une efficacité énergétique impressionnante
L'efficacité énergétique est devenue un sujet central pour les fabricants de processeurs, surtout depuis l'irruption d'Apple sur ce secteur, avec ses puces M offrant un niveau d'autonomie délirant à ses MacBook, très loin de ce qu'on pouvait trouver de mieux dans le monde des PC portables sous Windows. Pour réduire l'écart, Intel a donc opéré une transformation radicale de l'architecture de ses processeurs, la "plus importante depuis 40 ans" selon ses propres termes. Les nouveaux Core Ultra adopte donc l'architecture Meteor Lake, un agencement des composants en tuiles (tile) qui se rapproche de celui des puces ARM qu'on trouve dans les smartphones, mais sans abandonner l'architecture historique x86_64.
Dans cette organisation, les unités de calcul sont regroupées au sein de tuiles dont chacune est spécialisée et optimisée pour un type de tâches et d'opérations. Les différents tuiles sont assemblées et reliées entre elles via une nouvelle méthode baptisée Foveros, qui promet des gains en matière de performance énergétique de l'ordre de 20 %. L'ensemble de ces composants est fabriqué via un nouveau procédé dénommé Intel 4 qui, comme son nom ne l'indique pas, correspond à une finesse de gravure de 7 nanomètres, contre 10 auparavant, et offrirait une densité de transistors par mm² équivalente à celles des procédés en 3 et 5 nanomètres de TSMC et Samsung, selon les dires d'Intel.
En plus de ce réagencement complet des composants, l'architecture Meteor Lake prolonge un concept introduit sur l'avant-dernière génération (Alder Lake) de processeurs Intel, à savoir le mélange de différents types de cœurs au sein de la puce. Les Core Ultra comprendront donc des cœurs dits Performants (P-Core), en charge des calculs les plus exigeants, des cœurs Efficaces (E-Core) pour les opérations moins gourmandes, et enfin de tous nouveaux cœurs Efficaces-Basse Consommation (E-LP Core), pour s'occuper des tâches les plus courantes. La distribution des charges de travail entre les trois types de cœurs est géré par le Threads Director, un composant tenant le rôle d'aiguilleur dont la mission est d'allouer les tâches de manière optimale, et dont le fonctionnement a encore été amélioré sur cette génération.
Dans les faits, ce sont donc les cœurs E-LP à basse consommation qui fonctionnent la plupart des temps, et qui ne passent le relais aux cœurs Efficaces et Performants qu'en cas de nécessité. Ce mode de fonctionnement permet une réduction drastique de la consommation énergétique dans la plupart des usages, qui s'ajoute à celle déjà offerte par la nouvelle architecture. À titre d'exemple, Intel indique que la lecture d'une vidéo Netflix utilise 25 % d'énergie en moins avec un Core Ultra 7 165H qu'avec un Core i7-1370P... et cette promesse semble totalement confirmée par notre test du Asus Zenbook 14 OLED UX3405, un ultraportable qui embarque un Core Ultra 7 155H et qui a tenu 16 heures en lecture vidéo, contre 10 à 12 heures au maximum sur un modèle équivalent doté d'un processeur de la précédente génération. Ce résultat est particulièrement enthousiasmant et rapproche l'autonomie des Core Ultra de celle qu'on trouve sur les MacBook d'Apple.
Intel Core Ultra : une section graphique intégrée enfin à la hauteur
Dans un autre domaine, c'est cette fois-ci face à AMD qu'Intel avait pris du retard. Le fabricant des processeurs Ryzen avait en effet surpris tout le monde en 2022 en dévoilant ses Radeon 680M, des unités de traitement graphique intégrées (iGPU) directement dans le processeur, et qui offrait un niveau de performance en jeu encore jamais vue avec ce type de composant. C'est d'ailleurs en grande partie sur le succès des processeurs dotés du Radeon 680M, puis de son successeur le 780M, que repose l'essor de consoles portables comme le Steam Deck et la ROG Ally. De son côté, Intel disposait bien d'une technologie d'iGPU avec ses puces Irix Xe, mais elles affichaient des performances clairement en deçà des Radeon d'AMD.
Mais comme en matière d'efficacité énergétique, tout cela semble sur le point de basculer. Pour ses Core Ultra, Intel a modifié en profondeur la partie graphique intégrée à ses processeurs, en remplaçant les cœurs Iris Xe vieillissants par des cœurs issus de ces cartes graphiques Intel Arc pour PC de bureau et baptisés Xe-LPG. L'entreprise avance que cette nouvelle architecture graphique offrirait des performances multipliées par deux pour le même niveau de puissance électrique, soit un niveau de performance par watt lui aussi doublé. Cet iGPU nouvelle génération permettrait à Intel de revenir au niveau des Radeon d'AMD et même de les dépasser dans certains cas. Il faudra évidemment attendre de tester des machines des jeu embarquant des Core Ultra pour vérifier ces dires en situation réelle, mais la perspective de voire débarquer prochainement des consoles portables dotées de la solution d'Intel, avec peut-être un bond en matière d'autonomie, est en elle-même déjà très intéressante.
Les nouveautés concernant les capacités graphiques des Core Ultra ne s'arrêtent pas là, puisque l'intégration de l'architecture Intel Arc dans les iGPU apporte la gestion de DirectX12 Ultimate, la prise en charge matériel de l'encodage et du décodage de l'AV1 (le dernier codec en passe de s'imposer sur le plupart des services de streaming vidéo), la possibilité de brancher jusqu'à 4 écrans et, surtout, l'arrivée de la solution de mise à l'échelle (upscaling) d'Intel, dénommée XeSS.
Les technologies d'upscaling sont le nouveau nerf de la guerre dans le secteur des jeux vidéos, car elles permettent d'améliorer drastiquement les performances dans les titres les plus gourmands, en abaissant la définition native dans laquelle sont calculées les images avant de les mettre à l'échelle de la définition de l'écran, par un procédé s'appuyant sur des techniques d'intelligence artificielle. Sur le marché des PC de bureau, Nvidia domine clairement la partie avec son DLSS, et sur celui des consoles portables, AMD s'est imposé avec son Radeon Super Resolution (RSR). Encore une fois, l'arrivée d'Intel et de son XeSS pourrait donc bousculer quelques acteurs bien établis et offrir de belles perspectives aux joueuses et joueurs, d'autant que les gains de performance annoncés par le constructeur ne semblent pas anecdotiques.
Attention toutefois, tous les processeurs Core Ultra ne bénéficieront pas de la partie graphique Intel Arc GPU, seuls les modèles avec un numéro se terminant par la lettre H en seront dotés. Par ailleurs, l'ordinateur embarquant ces puces devra obligatoirement disposer de 16 Go de mémoire en double canal pour que l'iGPU Intel Arc fonctionne. Si vous envisagez de faire l'acquisition d'un ordinateur portable doté d'un Core Ultra pour profiter spécifiquement de la partie graphique, soyez donc attentifs à la dénomination du modèle de processeur et caractéristiques de la mémoire vive.
Intel Core Ultra : des modules IA parés pour le futur
L'intelligence artificielle était au cœur de la conférence d'Intel, de son titre (AI Everywhere) jusqu'à l'expression "AI PC" que les intervenants n'ont cessé de répété tout au long de la présentation. Comme AMD avec ses nouveaux processeurs Ryzen 8040, Intel met un accent particulier sur les nouvelles capacités de ses puces en matière d'intelligence artificielle. Le constructeur a intégré des unités de calcul spécialisées dans les opérations liées à l'IA sur les trois principales tuiles de son processeur. Ainsi la tuile graphique permettra d'accélérer les temps de rendu des outils de génération de contenu basé sur l'IA, tels que Stable Diffusion, et la tuile CPU offrira quant à elle une réactivité accrue pour les tâches d'IA nécessitant une très faible latence comme la traduction en temps réel. La tuile SoC contiendra quant à elle un véritable Neural Processing Unit (NPU), une unité de calcul spécifiquement conçu pour effectuer des opérations d'intelligence artificielle avec la meilleure efficacité énergétique possible. Ce NPU permettra notamment de décharger le CPU et le GPU de certains calculs d'IA afin de réduire la consommation énergétique et d'améliorer encore l'autonomie des machines dotées d'une processeur Core Ultra.
Paradoxalement, si les performances des processeurs Meteor Lake en matière d'intelligence artificielle ont occupé une place prépondérante dans la conférence d'Intel, c'est pourtant le domaine qui aura le moins d'impact direct sur les utilisateurs, du moins dans l'immédiat. En effet, les applications pratiques des technologies d'intelligence artificielle sont encore rares pour le grand public, hormis quelques gadgets superficiels pour la visioconférence. Les outils les plus populaires, tels que ChatGPT et Midjourney, sont pour le moment des programmes qui s'exécutent sur des serveurs distants et ne sont donc pas dépendants des performances du processeur de l'utilisateur. Cependant, la tendance actuelle, ou du moins celle qu'anticipe Intel et les autres fabricants de puces, semble être de déplacer progressivement l'exécution des programmes s'appuyant sur les technologies d'IA des datacenters vers les machines des utilisateurs (from the cloud to the edge, dans le jargon des marketeux). Dans cette perspective, Intel prend donc de l'avance et prépare ses processeurs à accueillir le déferlement futur d'applications d'intelligence artificielle et autres assistants personnels, censés enchanter nos vies et soulager tous nos maux.
Intel Core Ultra : des PC équipés des nouvelles puces déjà disponibles
Plus prosaïquement, on peut noter avec plaisir que les annonces d'Intel ne sont pas que de belles et vagues promesses, et que les constructeurs de PC portables ont d'ores et déjà dégainés plusieurs modèles dotés des processeurs Core Ultra. Comme évoqué en introduction, Asus commercialise dès à présent l'excellent Zenbook 14 OLED UX3405, que nous avons testé et qui délivre des performances et une autonomie vraiment remarquables pour un ultraportable. De son côté, Acer propose déjà un Swift Go embarquant également un Core Ultra 7 155H, et d'autres références apparaîtront sans aucun doute très prochainement chez d'autres grands constructeurs, comme Lenovo, Dell ou HP. Une très bonne occasion de s'équiper d'un ordinateur portable dernier cri juste avant les fêtes de fin d'année, d'autant que les prix affichés sur les premiers modèles disponibles restent tout à fait raisonnables, surtout en comparaison des "stars" d'Apple.
Une chose semble sûre : Meteor Lake représente bien plus qu'une petite évolution marginale pour Intel, et c'est plutôt d'un véritable bond générationnel qu'il convient de parler. Les Core Ultra incarnent une toute nouvelle génération de processeurs tournée vers l'avenir. Et la suite promet d'être passionnante.