LobbyLeaks : le numéro vert de l'Europe pour épingler les GAFAM
La guerre continue entre les GAFAM et le Parlement européen, qui vient de lancer LobbyLeaks, un service en ligne pour dénoncer toute pratique visant à influencer la politique numérique européenne. Les géants de la tech n'ont qu'à bien se tenir !
Il ne se passe pas un mois sans qu'un des GAFAM – les géants du numérique Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft – ne reçoive une lourde amende de la part de l'Union européenne. En effet, les contentieux avec celle-ci se sont multipliés ces dernières années. Pratiques anticoncurrentielles, fiscalité, protection des données personnelles – les pratiques des entreprises vont souvent à l'encontre du Règlement général sur la protection des données (RGPD) – , désinformation et haine en ligne... Les motifs de litiges sont légion ! À l'échelle de la France, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a récemment infligé une amende de 60 millions d'euros à Microsoft pour sa mauvaise gestion des cookies sur son moteur de recherche Bing et épinglé Apple pour l'utilisation de traceurs publicitaires sans le consentement explicite des utilisateurs d'iPhone – ce qui, en plus, contredit sa politique de confidentialité. Certains élus européens et ONG ont décidé de passer à la vitesse supérieure et ont créé LobbyLeaks, un numéro vert pour qui aurait des informations sur les pratiques douteuses – si ce n'est illégales – des multinationales, notamment les tentatives d'influence indirecte sur l'agenda de la politique technologique de l'Union européenne.
LobbyLeaks : un service pour dénoncer le lobbying du numérique
Comme le rapporte The Guardian, c'est le député européen néerlandais Paul Tang qui est à l'origine du projet. Le but : garantir davantage de transparence concernant les pratiques du lobbying des grandes entreprises de la tech au niveau européen. Pour cela, il compte sur LobbyLeaks pour recueillir des données sur les efforts de lobbying qui pourraient viser l'élaboration de la politique numérique de l'UE, comme par exemple le recours à des "associations industrielles" ou à des cabinets de conseil tiers sans divulgations claires, ou encore à des études universitaires discrètement financées dans le but d'écrire des recherches favorables à certains projets – projets qui se révèlent bien évidemment très rentables pour les GAFAM.
Paul Tang et ses associés s'attaquent directement à la pratique de l'astroturfing. Celle-ci consiste, pour une entreprise ou un groupe ayant un intérêt particulier, à donner l'illusion d'un soutien populaire ou d'une légitimité scientifique afin de soutenir ses intérêts, généralement pour des fins publicitaires ou politiques. Bien évidemment, les commanditaires du message ou de l'organisation sont dissimulés afin de faire croire qu'il provient ou est soutenu par des citoyens "ordinaires" et des institutions indépendantes. "En tant que politiciens, il est de notre devoir d'équilibrer les intérêts de l'industrie, de la société civile et de la société en général. La manipulation par des groupes de pression véreux est une menace non seulement pour l'élaboration des lois, mais aussi pour l'ensemble de notre démocratie", explique Paul Tang.
Bien qu'il s'agisse d'un "numéro vert", LobbyLeaks prend en réalité la forme d'un site Web accessible à l'adresse LobbyLeaks.eu. Il est avant tout destiné aux élus et employés du Parlement européen, qui peuvent y soumettre les actions et contenus qu'ils jugent suspicieux, comme des e-mails inhabituels qui leur ont été envoyés ou des publicités ciblées qui défendent les points de vue des GAFAM. Bien entendu, tout est crypté. Ensuite, les deux ONG Corporate Europe Observatory (CEO) et LobbyControl, qui s'occupent du site, se chargeront d'enquêter sur les rapports. Voilà qui annonce de futures amendes !