Permis de conduire numérique : tout ce qu'il faut savoir sur le nouveau document
C'est officiel : depuis le 14 février, le permis de conduire est décliné en version numérique, stockée sur smartphone au sein de l'application France Identité, pour simplifier les démarches et lutter contre les fraudes. Et ce pour tous ! Voici tout ce qu'il faut savoir.
Le Gouvernement est bien déterminé à poursuivre sa stratégie de numérisation des services administratifs de l’État français, notamment avec le déploiement de la e-carte vitale prévu pour fin 2025. Il s'attaque maintenant au permis de conduire, qui aura lui aussi un double numérique conservé sur smartphone. D'ailleurs, dans un article publié le 13 février, Le Parisien annonce que le permis de conduire numérique est disponible pour tout le monde à compter de ce mercredi 14 février.
Le permis de conduire numérique prend la forme d'un fichier sécurisé, stocké dans l'application mobile France Identité – qui accueille déjà la carte d'identité au format numérique pour les personnes ayant la nouvelle version de la CNI, actuellement disponible en version bêta sur Android et iOS (voir notre article). Notons au passage que, site gouvernemental oblige, l'application vient de tomber en panne à cause de l'afflux soudain de trois millions d'utilisateurs ! Bien évidemment, ce permis de conduire dématérialisé contient les mêmes informations que le document physique, qui reste valable : identité du titulaire, catégories obtenues, date de validité, etc. Facultatif et gratuit, il est accessible sans connexion Internet, pour être consultable en toute circonstance. Notons que Gérald Darmanin avait profité de l'occasion pour annoncer la fin de la vignette assurance verte, que l'on retrouve habituellement sur les vitres avant des véhicules, qui sera elle aussi dématérialisée à partir du 1er avril 2024. À la place, la police aura immédiatement accès au contrat d'assurance d'un véhicule en scannant sa plaque d'immatriculation. Voilà qui devrait simplifier les choses !
Permis de conduire numérique : quels avantages ?
Lors d'un contrôle routier, le permis de conduire numérique a la même valeur que sa version physique, sauf qu'il est compliqué de dire qu'on l'a oublié à la maison – on part davantage sans son portefeuille que sans son smartphone. Il peut être présenté aux forces de l'ordre lors d'un contrôle routier, qui utilisent alors leurs smartphones NEO dotés d'un lecteur de puce NFC pour vérifier que le conducteur se déplace en toute légalité. Il peut également être présenté aux loueurs de véhicules, à son employeur ou aux assureurs, via la génération rapide d'un justificatif attestant de sa capacité à conduire, qui peut être envoyé en quelques clics par Gmail ou WhatsApp. Notons toutefois que, pour que le permis de conduire numérique soit valide en cas de contrôle de police, il faut obligatoirement présenter une carte d'identité biométrique – celle au format carte bleue, disponible depuis deux ans – qui devrait, elle aussi, bientôt être dématérialisée et stockée dans France Identité (voir notre article).
Le permis de conduire numérique est bien pratique sur plusieurs autres points. En effet, le conducteur pourra consulter son solde de points en ligne, mais aussi pour des procédures en ligne, telles que les demandes de procuration (voir notre article). En outre, le ministre de l'Intérieur considère qu'il s'agit d'une évolution qui réduit les risques de fraude, de falsification et d'usurpation d'identité. En effet, le fichier est chiffré et protégé par un code ou une empreinte digitale – personne d'autres que leurs auteurs et leurs destinataires ne pourra les consulter. Toutefois, le e-permis de conduire ne remplacera jamais totalement la version physique, et servira plutôt pour faciliter les démarches administratives numériques. En plus, c'est pratique en cas de perte, de vol ou de détérioration du permis de conduire. En effet, il suffira de télécharger à nouveau le fichier numérique sur son smartphone, sans avoir à se rendre en préfecture ni à payer un timbre fiscal. Reste qu'il sera certainement encore nécessaire de posséder la version physique du permis de conduire, au moins pour effectuer certaines démarches, comme louer un véhicule à l'étranger.
Permis de conduire numérique : quand et comment en profiter ?
Les premières expérimentations du permis de conduire numérique ont été testées fin 2023 dans trois départements français, à savoir le Rhône, les Hauts-de-Seine et l'Eure-et-Loir. Suite aux résultats, qui se sont révélés concluants, le permis de conduire numérique s'invite à présent sur notre smartphone. Pour importer son permis dans l'application, il y a deux options. La première consiste à récupérer votre Relevé d'information restreint (RIR) sur le site de téléservice MesPointsPermis, grâce à son numéro de permis. Pour faire simple, il suffit de scanner un QR Code. La seconde méthode, qui doit être mise en place en cours de l'année à venir, consiste à "importer mes droits à conduire" en interrogeant à distance la base de données de la Délégation à la sécurité routière. Le permis est ensuite téléchargé et est disponible hors connexion à Internet. Notons cependant que la France n'est pas la seule à se tourner vers cette alternative, puisqu'une version européenne du permis de conduire dématérialisé est d'ores et déjà envisagée.
Permis de conduire numérique : un document commun à toute l'UE
L'année dernière, plus de 20 000 personnes ont perdu la vie sur les routes de l'Union européenne, en particulier les piétons, les cyclistes et les conducteurs de trottinettes et motos. Face à ce constat, la Commission européenne avait annoncé en mars dernier dans un communiqué vouloir mettre en place un permis numérique commun aux 27 pays de l'Union européenne. "L'Union européenne serait la première région du monde à disposer de permis numériques reconnus par-delà les frontières", expliquait-elle. S'il est déjà possible de conduire en France avec un permis obtenu dans un autre pays européen et vice-versa, le but est d'aller plus loin dans la coopération entre les États. Ainsi, chaque automobiliste européen aurait la même version numérisée de son permis sur son smartphone, ce qui le rendrait plus facile à remplacer, à renouveler ou à échanger grâce à des procédures en ligne sur un portail dédié. Ce projet s'accompagnerait de nouvelles dispositions visant à coopérer pour appliquer les sanctions en cas d'infractions routières transfrontalières.
C'est pour cela que la Commission européenne a proposé d'instaurer un permis de conduire numérique, que l'on stocke sur son smartphone au lieu de la carte physique glissée dans son portefeuille. Cela doit permettre de faciliter les démarches administratives en cas de remplacement, de renouvellement ou d'échange, "étant donné que toutes les procédures se feront en ligne" – c'est déjà le cas en France, mais ce n'est pas systématique dans tous les pays de l'Union. Ce permis dématérialisé doit rendre "plus facile pour les citoyens de pays tiers ayant des normes de sécurité routière comparables d'échanger leur permis de conduire contre un permis de l'UE". Une fois qu'il sera bien implanté, la Commission européenne souhaite en faire le document par défaut pour tous les conducteurs et conductrices, même s'il sera toujours possible de demander l'obtention du permis de conduire européen en version papier.
Nous proposons la création d'un permis de conduire numérique, valable & reconnu dans tous les États membres de l'UE
— Commission européenne (@UEFrance) March 4, 2023
L'Union européenne serait la 1ère région du monde à disposer de permis numériques reconnus par-delà les frontières #RoadSafety
À l'occasion de ce nouveau permis, la Commission européenne révise également le règlement afin de s'adapter aux usages de conduite. Ainsi, elle prévoit une période probatoire d'au moins deux ans après la réussite de l'examen de conduite pour les conducteurs débutants ainsi qu'une règle de tolérance zéro à l'égard de la conduite en état d'ivresse car, même si les jeunes conducteurs ne représentent que 8 % de l'ensemble des conducteurs de voitures, deux collisions mortelles sur cinq impliquent un conducteur âgé de moins de 30 ans. En parallèle, elle souhaite améliorer les formations pour mieux prendre en compte la sécurité des piétons et des cyclistes, ainsi que des utilisateurs de vélos et trottinettes électriques. Elle désire également permettre aux jeunes de passer leur examen de conduite et de commencer à conduire des voitures et des camions à partir de l'âge de 17 ans, à condition qu'ils soient accompagnés, afin d'acquérir l'expérience de la conduite et ainsi pallier à la pénurie de chauffeurs routiers. Enfin, crise climatique oblige, elle compte effectuer une transition vers des "véhicules à émissions nulles".
Permis de conduire numérique : renforcer les sanctions transfrontalières
Mais si l'Europe cherche à simplifier les procédures pour obtenir le permis, c'est aussi pour faciliter la transmission des données entre les États membres et, de ce fait, davantage appliquer les sanctions aux auteurs d'infractions. En effet, si la coopération entre pays frontaliers a déjà été améliorée depuis quelques années grâce aux fichiers dématérialisés, elle souffre encore de quelques lacunes. Selon la Commission européenne, environ 40 % des infractions transfrontières ont été commises en toute impunité en 2019, soit parce que l'auteur de l'infraction n'avait pas été identifié, soit parce que le paiement n'avait pas été effectué. Un permis européen en ligne permettrait de faciliter les choses. Les automobilistes pourraient accéder à un portail en ligne rassemblant les différentes règles de circulation des pays membres et permettant de payer directement les éventuelles amendes qui leur auraient été infligées. Un système qui devrait permettre "l'égalité de traitement des contrevenants résidents et non-résidents".
Les propositions de la Commission européenne ont également pour but de combler certaines lacunes. Actuellement, la législation européenne ne prend en compte que les infractions les plus fréquentes et flagrantes comme les excès de vitesse ou la conduite en état d'ivresse. Elle pourrait donc étendre le champ d'application des infractions routières couvertes à la circulation en sens interdit, au stationnement et au dépassement dangereux, au franchissement d'une ligne blanche, à l'utilisation d'un véhicule en surcharge, au non-respect des règles relatives à l'utilisation de voies de secours d'urgence et au non-respect d'une distance suffisante par rapport au véhicule qui précède. "L'ensemble des propositions vise à (…) ce qu'il n'y ait pas d'impunité pour ceux qui enfreignent les règles de sécurité routière au-delà des frontières, grâce à un meilleur échange transfrontalier d'informations sur les infractions routières et la déchéance du droit de conduire pour les plus graves. La sécurité au volant est cruciale dans nos efforts pour réduire de moitié le nombre de tués et de blessés graves sur les routes d'ici à 2030", expliquait Adina Vălean, la commissaire européenne aux Transports en mars.
Toutes ces propositions sont actuellement à l'étude et devront être examinées par le Parlement européen et le Conseil avant une éventuelle application. Une fois que ce sera fait, il faudra fixer les règles détaillées sur les caractéristiques de ce permis de conduire numérique européen sur les questions de l'interopérabilité, la sécurité, les essais, la vérification et l'interface du titre, mais aussi du côté des administrations. Sans compter qu'il faudra uniformiser les règles de circulation, chaque pays ayant les siennes.